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Savard-Fournier, Soeur Marie-Ange
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Savard-Fournier, Soeur Marie-Ange
Genealpha a écrit:
Notice biographique de Soeur Marie-Ange Fournier (Marie de la Trinité)
décédée le 21 juillet 2002
Hommage !
à une Petite Fille de Saint-Joseph
Soeur Marie-Ange Fournier, notre mère!
Mireille Fournier
"Ma vie s'est déroulée normalement, parce que Dieu en a tenu le rouleau et que moi, j'ai essayé de ne pas en mêler les fils: fil blanc de mon enfance, fil bleu de mes rêves, fil rose de mes jours heureux, fil noir de mes deuils, fil mauve de ma vieillesse. Cette vie, chers enfants, s'est donc brodée au jour le jour, sur un canevas remis entre mes mains dès mon premier jour!"
Voilà en quels termes notre mère s'adressait à nous dans une biographie écrite de sa main dans les années 1970. Ce souci d'obéissance, de soumission et de confiance absolue en un Dieu familier, en même temps qu'à un code d'éthique spirituel encadré dans les normes d'une religion catholique traditionnelle, a façonné et guidé d'abord Marie-Ange Savard, ensuite Madame Roland Fournier, puis soeur Marie de la Trinité, et aujourd'hui soeur Marie-Ange Fournier.
Grande-Vallée, village typique du nord de la Gaspésie, vit naître, le 3 novembre 1903, la petite Marie-Ange. Elle était l'aînée d'une famille de trois enfants dont une soeur, Gertrude, et un petit garçon mort à la naissance, mais qui sera remplacé plus tard par Pierre-Paul, le dernier-né d'une voisine mourante. Notre grand-mère, Delphine Caron, 18e d'une famille de 20 enfants, était native de Grande-Vallée. Albert Savard, notre grand-père, avait longtemps vécu à Coaticook, mais était natif des Escoumins, dans le comté de Charlevoix.
Pour la " petite histoire ", je vous dirai que Grande-Vallée a commencé d'une manière peu commune. Chaque année , de mai à novembre, des pêcheurs venant de Montmagny à Saint-Jean-Port-Joli se dirigeaient vers une anse choisie au nord de la Gaspésie. Ils arrivaient sur leur bateau de pêche avec leurs gréements, leur famille et de la nourriture pour cinq mois, comptant aussi sur le poisson pêché pendant l'été. Mais en 1842, la famille d'Alexis Caron ayant plié bagage les derniers, fut prise dans l'une de ces redoutables tempêtes d'automne dans laquelle leur bateau fut brisé et une part de leur biens perdus. Sans aucun espoir de secours, ils durent s'installer dans un abri précaire et faire face stoïquement à ce long, glacial et angoissant hiver. Ils étaient cinq: le couple Caron et leurs trois enfants. Ils survécurent! Les Fournier, arrivant au printemps et retrouvant leurs amis affamés, amaigris, mais vivants, décidèrent de s'installer définitivement dans cette anse, lui préférant son isolement aux risques répétés de ces voyages périlleux. Nos ancêtres étaient nés!
À 13 ans, Marie-Ange remarque Roland, fils d'Arthur et de Démerise Labrecque, le 8e d'une famille de 15 enfants. À 15 ans, elle l'aime pour de bon. À partir de ce moment, la ligne de vie de notre mère est double. Ils sont tous deux natifs du même village, ils ont les mêmes ancêtres, les mêmes coutumes et les mêmes rêves. Ils aiment la mer, le vent qui charrie de bonnes odeurs, la neige qui craque sous les pas. Ils s'aiment! Autour d'eux, on se marie jeune, on se bâtit une petite maison et on reste sur place. Mais Marie-Ange et Roland sont plus ambitieux! En 1916, Marie-Ange part pour le couvent de Cap-Chat étudier chez les " Filles de Jésus ". Roland commence un cours commercial à Montréal, au Collège Saint-Laurent , où son futur célèbre cousin , Esdras Minville, déjà un ancien étudiant, l'attend. Mais la mort presque subite de son père oblige Marie-Ange à laisser son rêve de longues études. Une double tragédie! Elle obtiendra un certificat d'enseignement et deviendra, l'année suivante, l'institutrice de son village. Alors, une longue correspondance s'amorce entre les deux amoureux. Elle durera dix ans et gratifiera Marie-Ange d'une remarquable plume d'épistolière.
Roland, après avoir obtenu son " diplôme commercial " entreprend son cours d'École Normale à l'Université Laval de Québec. Une fois ce cours terminé, il enseignera successivement à Grande-Vallée, à Québec, à Victoriaville et à Sayabec. Nous sommes rendus en 1929.On lui offre un poste de professeur de mathématiques et d'anglais à l'école d'agronomie d'Oka. Il accepte et s'inscrit comme stagiaire en mathématiques à l'Université de Montréal. Alors les vies, de part et d'autre, s'organisent et, le 21 août 1930, Marie-Ange et Roland " convolent enfin en justes noces " pour venir s'installer définitivement à Oka!
La vie de Madame Fournier commence! Enfin, à temps complet avec l'homme qu'elle aime, dans ce village renommé, entre lac et montagne, attirant les chics touristes, elle évoluera avec son jeune mari dans ce milieu de professeurs instruits et intéressants.
Le "Château Éthier", maison nouvellement acquise est un rêve. Il ne manque que la mer! Mais chaque été ou presque, le mal du pays les poussera tous deux vers leur village natal.
Avec la venue de Ghislaine, la famille commence. Et chaque année... ou presque, Mireille, Guy, Jacques, Clarisse, Francine, Yvane, tour à tour naîtront. Beaucoup plus tard, nos parents accepteront de prendre sous leur tutelle Gaby Fontaine, devenue en peu de temps orpheline de mère et de père, et pour qui on conservera une affection spéciale.
Donc, Madame Fournier aborde cette nouvelle carrière d'épouse, de mère et d'éducatrice, avec la ferveur qu'elle met à toute chose. Avec sept enfants, elle se voit encore institutrice et nous serons constamment poussés à donner " le maximum "! Pour nos parents, c'est une question d'honneur! Pour nous, une question de survie...! Mais oui, maman, c'est récent... mais on a fini par oublier la mémorable " journée des bulletins "!!! Quelle force de caractère il fallait pour satisfaire aux exigences d'autorité, d'intégrité et d'excellence de ce temps-là! Nos parents compétents, confiants et tenaces l'ont eue.
Au cours de l'année 1936, notre père obtint son baccalauréat en agronomie, en passant les examens de l'Institut agricole d'Oka. En 1941, le " Château " se révélant trop étroit pour dix personnes, notre chère tante Gertrude étant venue seconder notre mère pour quelques années, notre père décide de construire " l'Abri-Vent ". C'est une maison blanche, spacieuse, sise au pied de la forêt de pins plantée par les Sulpiciens il y a quelque cent ans, au 122 rue de l'Annonciation. Mais maman, Ghislaine et moi, les deux aînées, garderons toujours la nostalgie de ce petit " Château " à deux étages, entouré d'érables centenaires et sis sur la rue Notre-Dame, en plein coeur du village.
Le " Château " se révélant trop étroit, notre père décide de construire " l'Abri-Vent "
Comment décrire maman pendant toutes ces années? Je revois une femme à la taille fine, distinguée, toujours élégante, ce qui faisait dire à papa, en revenant d'une soirée : " C'est encore toi qui étais la plus belle! " Une femme toujours amoureuse de son mari! Une femme très pieuse : tous les matins, beau temps, mauvais temps, maman marchait allègrement son kilomètre, assistait à la messe, revenait à la maison et s'assoyait gaiement à table prendre un bon gros déjeuner bien mérité, tout en nous ayant préparés, les sept, pour le départ vers l'école. Nous avons toujours eu le prix d'assiduité! C'est maman qu'on aurait dû décorer!
Un de ses talents, qui ressort aujourd'hui et dont on a profité pendant toute notre jeunesse, c'est celui de raconteuse. Au temps de l'enfance de maman, il n'y avait pas de route dans Gaspé Nord. Le salut venait de la mer. Tout arrivait par bateau, du printemps à l'automne, et quand, à la mi-novembre, la sirène du dernier bateau laissait dans son sillage son dernier cri, les quelque 250 habitants de cette petite anse isolée demeuraient seuls, n'ayant que leur propres ressources pour passer le mieux possible au travers de ces longs mois d'hiver. Cela créait aussi des conteurs qui ne devaient faire appel qu'à eux-mêmes pour se divertir et s'amuser. Maman fait partie de ces derniers. Encore aujourd'hui, elle nous tient sur le pas de la porte pour nous raconter une histoire..." inédite ". Ses gendres raffolent de ses petites anecdotes et en redemandent, mais vous ne verrez jamais maman... " tarie "!
Pendant ses années d'épouse, elle parcourt le Québec avec le groupe des agronomes. Et sur l'Homéric, en mai 1958, elle part pour deux mois de rêve, en Europe avec papa. Ils se promettent d'y retourner. Jamais malade, maman est gaie, elle prie et chante du matin au soir jusqu'au...24 octobre 1961, date où notre père meurt d'une rupture du myocarde. Nous sombrons tous dans une peine sans nom! Le village entier est en deuil : on ne lui connaît pas d'ennemi! Comment maman va-t-elle survivre à cette moitié d'elle-même que la mort lui a arrachée? Trop petite, comme elle dit, pour porter cette peine immense toute seule, elle en refile le plus gros au bon Dieu et avec ses petits-enfants (elle en aura douze), elle continue bravement à prier et à chanter, même si c'est sur un ton plus bas.
Un cheminement intérieur se fait et trois ans plus tard, elle nous annonce qu'elle va entrer, comme religieuse, dans la communauté semi-cloîtrée des Petites Filles de Saint-Joseph. Même sa plus grande amie, madame Létourneau, notre adorée tante Noëlla, n'avait rien deviné. C'est la stupéfaction pour nous aussi, mais maman ne faisant rien à la légère, ayant toujours écouté fidèlement sa " voix intérieure " malgré d'incompréhensibles et pénibles desseins, s'incline et prend consciemment sa décision. Le 11 février 1964, elle devient, en présence de ses enfants aux émotions mêlées, soeur Marie-Ange de la Trinité.
On ne saura jamais ce qu'il lui en aura coûté de laisser ses enfants et ses petits-enfants, ses amis, ses villages d'Oka et de Grande-Vallée, et sa vie facile. C'est son secret!
Aujourd'hui, Soeur Marie-Ange Fournier a 86 ans. Si vous allez à la maison mère des Petites Filles de Saint-Joseph, à Pierrefonds vous verrez venir au-devant de vous une petite soeur impeccable dans sa robe blanche et son voile léger, un grand sourire aux lèvres, une malice au coin de l'oeil. Elle occupe le poste de réceptionniste depuis plusieurs années. Lucide, alerte, elle compose et raconte le plus souvent possible, elle prie et chante du matin au soir. Au milieu de ses soeurs qu'elle aime, elle est heureuse! L'histoire de vie de notre mère est un longue histoire d'amour.
Comme toute personne est marquée profondément pour sa vie par son milieu et sa famille, permettez que je mentionne quelques faits en ce sens, dans ces notes biographiques de notre chère Soeur Marie-Ange Fournier.
La naissance de Soeur Marie-Ange est consignée au registre des baptêmes le 3 novembre 1903 à Grande-Vallée, village typique du nord de la Gaspésie. Son père Albert Savard était natif des Escoumins (Saguenay) et sa mère Delphine Caron de Grande Vallée (Gaspésie) où le couple s'est établi. Trois enfants naissent de cette union : Marie-Ange, Gertrude, et un garçon qui est décédé peu après sa naissance.
Naître à Grande-Vallée au début du 20e siècle, c'était entrer dans une vie simple, faite de renoncement et de remarquable ténacité, le tout appuyé sur une foi austère et sans détour. Ayant vu le jour dans un des plus beaux sites de la Province de Québec, Soeur Marie-Ange vivait continuellement d'émerveillement et cette caractéristique la suivit toute sa vie.
À l'âge de 27 ans, le 21 août 1930, elle épouse monsieur J. Roland Fournier, un petit-cousin de son village, et le couple vient s'établir à Oka. Huit enfants naissent de cette union dont sept sont encore vivants.
À l'arc-en-ciel de bonheur et de gloire qu'elle entrevoyait pour toujours, se mêlèrent des jours de ténèbres et de grandes purifications. Mais est-il un seul bonheur humain qui n'ait ses revers de tristesse et de souffrance ?
Le 24 octobre 1961, le premier anneau d'une chaîne de détachements se brise. Après 31 ans de vie maritale, madame Fournier perd subitement son mari; le chef de famille disparaît! C'est un tournant difficile qui lui demande une force extraordinaire. Comme elle le dit : " Trop petite pour porter cette peine immense ", elle s'en remet à Dieu et, malgré Ses incompréhensibles desseins, elle s'incline avec confiance en l'avenir. La messe quotidienne dont elle se fit un devoir, même quand elle élevait ses enfants, ainsi que la prière presque continuelle gardent son coeur dans la résignation, et même dans la joie. Le rosaire à la main ou dans le coeur (à la Mère Teresa), ce qui fut une des caractéristiques de sa vie, elle continue son pèlerinage terrestre avec courage. Par sa prière toujours plus intense, elle cultivera dorénavant une blonde moisson pour agrandir le Royaume de Dieu, en particulier, en priant pour la sanctification des prêtres de l'Église.
À 60 ans, retenue par le seul devoir d'aimer et de soutenir spirituellement ceux à qui elle a donné la vie, dame Marie-Ange ressent peu à peu le poids de la grâce qui fait son oeuvre et l'émerge au-dessus de la masse.
Femme hors du commun dans la foi, elle renonce à une vie mondaine et à l'avantage d'une existence plus libre pour les siens. En réponse à l'appel de son Dieu qui fut toujours le plus grand amour de sa vie (comme elle le dit un jour à son époux), elle obtiendra de la Providence d'être livrée à la principale respiration de son âme, la prière, et d'être soulagée des soucis quotidiens de l'administration.
Le 11 février 1964, Soeur Marie-Ange se donne librement au Seigneur pour toujours et entre chez les Petites Filles de Saint-Joseph, qu'elle voyait comme les anges du sacerdoce. Elle resserre les liens de mutuelle sympathie qui existaient depuis au-delà de trente ans, alors qu'elle visitait nos soeurs à notre maison de vacances près du paisible lac des Deux-Montagnes, ainsi que celles qui travaillaient au presbytère, et près de qui elle communiait dans la petite église de l'Annonciation d'Oka. Rien de surprenant que la nouvelle religieuse se sente bien accueillie et reçoive des égards et des sentiments d'admiration. Toutefois, l'on ne saura jamais ce qu'il lui en a coûté de laisser sa vie facile, ses enfants et petits-enfants, ses amis, ses villages d'Oka et de Grande-Vallée.
Également, il est probable qu'au cours de ses trente-huit années de vie religieuse, Soeur Marie-Ange fut obligée de réitérer sa donation dans le sacrifice avec un grand S et dans l'oubli d'elle-même. Toutefois, nous sommes convaincues, par expérience, que le Dieu-Amour, créateur de tout " Amour " est encore plus fort, plus fidèle et plus comblant que toutes nos attaches humaines.
Elle prit l'habit religieux, le 8 septembre 1964 et reçut le nom de Soeur Marie de la Trinité, ce qui veut dire que durant son existence elle porta les quatre noms suivants : Marie-Ange Savard, madame J. Roland Fournier, Soeur Marie de la Trinité et finalement Soeur Marie-Ange Fournier.
Dès le noviciat, elle démontra beaucoup d'affection pour les jeunes religieuses qu'elle considérait un peu comme ses filles, ce qui la gardait jeune de coeur. Toujours, elle se montrait optimiste, malgré les mauvais jours; elle se refusait à toute attitude négative, du moins en apparence, elle effaçait les bouts de chemin de croix qu'elle ne confiait qu'aux prêtres à qui elle avait fréquemment recours dans la plus grande confiance. En général, elle s'attardait surtout à savourer les bons souvenirs du passé avec la détermination absolue d'entretenir et de continuer à marcher à la poursuite de son grand idéal.
Pourtant d'une forte personnalité, elle n'a jamais désiré les postes de commandement; elle avait beaucoup de respect et d'obéissance envers l'autorité. Il faut dire que l'amour qu'elle leur démontrait, ajouté à sa diplomatie, faisaient qu'elle obtenait à peu près tout ce qu'elle désirait; c'était facile pour les supérieures, car elle était peu exigeante, surtout pour elle-même. Simple, elle avait un grand esprit de pauvreté et sa santé était excellente. Il faut dire que les supérieures ont toujours su doser son travail en tenant compte de son âge et de ses capacités. En retour, elle se montrait d'une continuelle reconnaissance envers la Communauté.
En récréation, on la recherchait pour sa jovialité et son don de fine conteuse. Excellente comédienne, elle se prêtait volontiers à jouer un rôle ou préparait elle-même des soirées récréatives à la grande satisfaction de ses compagnes.
Si elle était fière du rang qu'elle occupait avant son entrée en communauté, vu qu'elle était l'épouse d'un professeur en agronomie à l'École Supérieure de la Trappe d'Oka, et qu'elle-même avait enseigné durant 10 ans avant son mariage; de plus, qu'elle avait deux filles religieuses chez les Soeurs de la Congrégation de Notre-Dame dont l'une est missionnaire au Guatemala, et que tous ses enfants ont un bagage intellectuel fort enviable " noblesse oblige ", face à son Dieu, en orante prosternée qu'elle fut toujours, ses paroles et ses confidences nous laissaient croire qu'elle devait redire :
" Seigneur, je n'ai pas le coeur fier
ni le regard ambitieux.
Je ne poursuis ni grands desseins
ni merveilles qui me dépassent.
Non, mais je tiens mon âme
égale et silencieuse.
Mon âme est en moi comme un enfant
comme un petit enfant contre sa mère. "
" Ps 130 "
La liste des emplois confiés à Soeur Marie-Ange Fournier se résume ainsi :
1966 aide à la confection du costume des religieuses
1967 aide générale au presbytère de la paroisse Saint-Esprit de Rosemont
1969 aide aux chambres à la Maison provinciale des Prêtres de Saint-Sulpice attenant à l'église Notre-Dame (responsable des fêtes récréatives)
1978 réceptionniste à notre Maison mère, rédactrice du Journal de la Communauté
1993 retraite
1997 séjour définitif à l'infirmerie
Soeur Marie-Ange, qui était une personne plus intellectuelle que manuelle, crut préférable, en toute humilité et conscience, de refuser la pratique de la dactylographie qu'on lui a proposée dès ses premières années de vie religieuse. Dans les maisons où elle a oeuvré, elle accepte les humbles tâches qui lui sont confiées et se caractérise par un accueil gracieux et distingué, chaleureux, aimable et poli, ce qui lui attire l'estime de tous ceux qui la côtoient. Elle n'avait rien de la religieuse renfermée, c'était une bonne vivante qui prenait sa place. Du temps où elle faisait les chambres à Notre-Dame (4 heures par jour), elle a eu la simplicité admirable d'avouer : " Je fais la partie la plus facile et ma compagne (une laïque) la plus lourde ".
Poète-née, d'une plume épistolaire originale, Soeur Marie-Ange a rédigé le Journal de la Communauté durant de nombreuses années. Ses écrits laissaient transparaître ses états d'âme et décrivaient les beautés et les humeurs de la nature : les bourgeons qui s'annonçaient, les fleurs qui se balançaient au gré du vent, le verglas sur les arbres, tout se prêtait pour inspirer son crayon; enfin, elle décrivait très fidèlement les événements du jour. Les archives en furent rafraîchies...
Au cours de sa vie religieuse, elle a été préservée des souffrances physiques jusqu'à l'âge de 90 ans. À ce tournant, à cause de sa vue faiblissante, c'est à regret qu'elle se vit déchargée de son emploi de réceptionniste. Sept jours sur sept, elle était fidèle à ses quatre heures de travail, ayant secrètement au coeur l'espoir qu'en décrochant le récepteur, elle puisse entendre la voix d'un(e) de ses enfants. Si elle a toujours montré beaucoup d'amour et de reconnaissance à sa famille religieuse, surtout à cause de ses affinités spirituelles, il est compréhensible, et même évident, qu'elle était d'un attachement incomparable pour ses enfants; ses conversations étaient cousues d'anecdotes tirées de leur souvenir, ce qui lui a valu quelques petites remarques; pourtant c'était des plus légitime, les enfants ne sont-ils pas une partie d'une mère.
Une fois retraitée, elle put désormais se consacrer davantage à la prière et implorer le ciel, à la mesure de son coeur, en égrenant des chapelets. Au pied du tabernacle, en orante toujours plus courbée dans la prière, elle fait d'incessantes confidences à Jésus et Lui recommande beaucoup de besoins pour les siens, l'Église et sa Communauté.
Depuis près de quatre ans, Soeur Marie-Ange était alitée et vivait des journées longues et silencieuses. Si volubile au cours de sa vie, elle ne dit plus que quelques mots et cela occasionnellement.
Comme dernière purification, sa conscience qui a toujours été des plus délicates, vit la peur de sa fin dernière et des désillusions semblent l'accabler. Vu que nous savons qu'elle a toujours recherché Dieu avant tout, son mutisme qui nous semblait en partie volontaire, nous laisse entendre que son espoir n'était qu'en Dieu; d'autant plus qu'elle a exprimé, quelque temps auparavant, que les seules paroles qu'elle désirait étaient la prière auprès de son lit; par signe, elle nous montrait sa reconnaissance.
Tout au cours de sa vie religieuse, la radio et la télévision étaient presque inexistantes, elle préférait la visite de ses enfants, et avec ses soeurs, la conversation et le récit inépuisable de ses souvenirs d'antan.
Comment nous imaginer le degré de sainteté de cette religieuse hors de l'ordinaire ? Nous laissons à la bonté et à la sagesse de Dieu de l'évaluer... Si notre soeur manifestait parfois quelques petits défauts, comme un peu de sévérité (relent de l'éducation de son enfance), même envers ses enfants qu'elle aurait voulu tous exceptionnels, de la promptitude et quelques petites antipathies mal dissimulées, sa bonté et son esprit de foi savaient les atténuer et les faire oublier.
À compter du 10 juillet, elle ne s'alimente plus et faiblit graduellement, elle reçoit donc pour la dernière fois l'Onction des malades. Le 19 juillet, les religieuses se réunissent pour réciter en commun la prière des agonisants et à compter de ce moment, elles se succèdent à son chevet pour l'accompagner et prier. Le 20 juillet, ses enfants passent une partie de la journée auprès d'elle; à compter de ce moment, l'état de la malade se maintient régulier jusqu'au lendemain le 21 juillet 2002 à 16h40, alors que sa résistance a flanché très rapidement. Une infirmière était auprès d'elle pour lui prodiguer des soins, et c'est alors qu'elle expira doucement dans les bras de son Dieu. Elle avait 98 ans et 8 mois dont 38 ans de vie religieuse. Immédiatement, la communauté de la Maison mère s'est réunie pour les dernières prières présidées par la Supérieure générale.
Le 26 juillet, à 14h00, en la fête de sainte Anne qui fut mère et grand-mère, les funérailles de Soeur Marie-Ange, également mère et grand-mère, et religieuse, ont lieu à notre Maison mère. La cérémonie funèbre fait davantage penser à un moment de glorification qu'à un jour de deuil, ce qui traduit ces paroles retrouvées dans une de ses lettres : " Pourquoi vous appliquer à la tristesse puisque ce départ n'est qu'une arrivée. "
Les funérailles sont présidées par monsieur le Chanoine Roger Laniel, aumônier de l'hôpital de Suroît de Valleyfield, ami de la famille. Quinze prêtres concélèbrent, dont huit de la Compagnie de Saint-Sulpice. Ses sept enfants et une centaine de parents, religieuses, amis et connaissances s'unissent à notre Communauté ainsi que quelques associés et infirmières de notre infirmerie.
À la fin de la cérémonie, trois témoignages sont brillamment rendus. D'abord, par Antoine, un arrière-petit-fils, qui garde un bon souvenir des contes de sa grand-mère; puis par Guy, l'aîné de ses deux fils qui a relaté l'appel et la vie religieuse de sa mère; et enfin, par Jacques, qui a décrit sa vie d'épouse et de mère.
Le Salve Regina qui clôt cette liturgie implore la miséricorde de Dieu, mais davantage Le loue pour ses magnificences à l'égard de notre chère défunte, Soeur Marie-Ange Fournier.
Au moment de son départ de la Maison mère, un dernier hommage est chanté, en espagnol, par huit religieuses missionnaires des Soeurs de la Congrégation de Notre-Dame.
Fait suite, l'inhumation au cimetière de la Congrégation à Cap Saint-Jacques, en compagnie de nombreuses personnes qui, par la suite, se sont réunies à la Maison mère pour un goûter familial.
Ensemble,
nous partageons la certitude
que l'affection de chère soeur Marie-Ange nous suit de là-haut
et que sa prière nous reste fidèle.
Qu'elle repose dans la paix !
Soeur Antonia Lacoste, p.f.s.j.
Secrétaire générale
http://www.pfsj.ca/pfsj_noticebiog_smaf.php
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